La question mérite d’être posée, tant les faits s’accumulent et dessinent une inquiétante tendance au sommet de l’État : le non-respect des lois ou une méconnaissance profonde des règles qui encadrent la République.
Le dernier épisode en date concerne l’arrêté pris par le ministère de la Communication, visant à interdire arbitrairement la parution de certains organes de presse. Une mesure qui a immédiatement suscité de vives critiques : nous avions rappelé que la liberté de création des médias est garantie par l’article 11 de la Constitution et qu’aucune autorisation préalable ne saurait être imposée par voie administrative.
La Cour suprême vient de confirmer cette lecture du droit en suspendant l’arrêté du ministère. Une décision salutaire, qui protège la liberté de la presse, mais qui ne doit pas faire oublier la gravité de la démarche initiale.
Car ce n’est pas un cas isolé.
Lors des débats autour de la loi d’amnistie, le gouvernement a une nouvelle fois montré une approche contestable du droit. Plusieurs juristes, constitutionnalistes et voix indépendantes avaient souligné les contradictions de ce texte avec les principes fondamentaux de la Constitution. Là encore, les mises en garde n’ont pas été entendues. Les députés de la majorité ont fini par voté une loi que le conseil constitutionnel a jugé par la suite contraire à la constitution.
Ce qui est en cause ici, c’est bien le respect de l’État de droit. Un État de droit ne vit pas seulement de quelques décisions judiciaires isolées : il exige que le pouvoir respecte en permanence le cadre légal, même et surtout lorsqu’il pense pouvoir imposer sa volonté.
Les citoyens doivent rester vigilants. Car l’histoire montre qu’une République ne bascule pas du jour au lendemain : elle s’érode par petites entorses, par habitudes prises au mépris du droit.
La décision de la Cour suprême rappelle que des garde-fous existent encore. Mais il revient à chacun de veiller à ce qu’ils restent solides. Et à ce que le respect de la Constitution ne devienne pas l’exception, mais bien la règle.
Ameth DIALLO
Coordinateur national de Gox Yu Bees