Sous la plume acérée du Dr Mouhamed Ben Diop, économiste et responsable du Parti Pass-Pass, une analyse croisée des rapports d’exécution budgétaire du premier trimestre 2025 et du quatrième trimestre 2024 révèle un fossé inquiétant entre les promesses affichées par l’État et la réalité des finances publiques. Une contribution qui sonne comme une alerte froide, factuelle et sans concession.
1.
Recettes fiscales en hausse, dons en chute libre
La bonne nouvelle ? Les recettes fiscales ont progressé au début de l’année 2025. La mauvaise ? Cette hausse est le fruit d’un matraquage fiscal jugé excessif, provoquant des fermetures d’entreprises, des licenciements et un net ralentissement de l’activité économique.
Plus grave encore : les dons extérieurs – souvent cruciaux pour équilibrer les budgets – se sont effondrés de plus de 70 %, laissant penser que les partenaires techniques et financiers ont pris leurs distances. Un désaveu silencieux, mais lourd de sens.
2.
Investissement public : la grande panne
L’investissement public peine à décoller. Au T1 2025, seuls 2,6 milliards de FCFA ont été dépensés par l’État sur ses propres projets. Un chiffre dérisoire au regard des attentes. Là où le discours promettait relance, emploi et transformation structurelle, les actes traduisent plutôt une paralysie administrative, selon l’auteur : “On attendait un coup d’accélérateur, on a eu un frein à main.”
3.
Des milliards votés, mais presque rien engagé
Malgré un budget ambitieux, les taux d’exécution sur certains postes clés tournent autour de 1 %. L’auteur évoque une “panne sèche” de l’État. Des fonds pourtant votés ne se traduisent pas en projets concrets. “Le gouvernement se gave, la population agonise”, tranche-t-il.
4.
Silence sur les dettes internes : un danger latent
Fin 2024, plus de 500 milliards de FCFA d’arriérés n’avaient toujours pas été réglés. Et début 2025 ? Silence radio. Aucun effort significatif n’apparaît dans les comptes. Pour Dr Diop, cette opacité pourrait miner la crédibilité de l’État auprès de ses fournisseurs et partenaires : “Jub, jubeul, jubenti…”
5.
Des transferts qui explosent, mais peu d’impact social
Subventions à l’énergie, aides aux universités, transferts divers : les dépenses sociales explosent. Pourtant, les plus pauvres continuent de subir. L’auteur suggère un recalibrage des bénéficiaires, soulignant que “les plus fragiles attendent toujours”, malgré l’envolée des dépenses publiques.
6.
Crédits en hausse, efficacité en berne
Autre paradoxe : les crédits destinés aux biens et services sont en nette progression… mais leur taux d’utilisation s’effondre. L’argent est là, mais mal utilisé, faute de capacité ou de procédures efficaces dans les ministères. Une inefficacité budgétaire qui interroge.
Et maintenant ? 9 recommandations fortes
Dr Mouhamed Ben Diop ne se contente pas du constat. Il avance une série de propositions concrètes, parmi lesquelles :
- reconnaître et budgétiser les arriérés,
- diversifier les partenariats,
- prioriser les projets “matures”,
- créer un registre public des dettes de l’État,
- mieux encadrer les subventions,
- et renforcer les capacités opérationnelles des ministères.
Une critique fondée… et une invitation à agir
Entre froideur des chiffres et chaleur des réalités sociales, cette analyse dresse un tableau sévère, mais salutaire. Au-delà de la critique, elle appelle à une réforme courageuse de la gestion budgétaire, afin que les ressources – déjà limitées – produisent des effets visibles et équitables.
Le défi est lancé. Reste à savoir si le gouvernement saura y répondre.