Réunis dans la capitale britannique pour le forum Africa Debate, plusieurs décideurs économiques africains, responsables d’institutions financières et représentants de gouvernements ont débattu des perspectives économiques du continent. Parmi les interventions marquantes de l’événement, celle d’Abebe Aemro Selassie, directeur du département Afrique du Fonds monétaire international (FMI), a particulièrement retenu l’attention, notamment pour ses remarques sur la situation économique du Sénégal.
S’exprimant dans une déclaration relayée par l’agence Reuters, le haut responsable du FMI a évoqué « des zones d’ombre » relevées dans la gestion financière de l’ancien régime sénégalais. « Nous attendons que le gouvernement partage avec nous les chiffres définitifs et les principaux problèmes qu’il a identifiés », a-t-il affirmé, avant de souligner la volonté du FMI d’entretenir un dialogue technique « approfondi » avec les nouvelles autorités issues de l’alternance politique de mars 2024.
Cette sortie du FMI intervient dans un contexte de réajustement des relations entre Dakar et ses partenaires financiers. Depuis la victoire du président Bassirou Diomaye Faye, les nouvelles autorités sénégalaises s’efforcent de rétablir la confiance, alors que le pays reste sous surveillance budgétaire renforcée. Le FMI, qui avait suspendu ses décaissements en 2023, exige désormais des clarifications sur les pratiques budgétaires passées.
L’audit mené par les nouvelles autorités a révélé une importante sous-estimation du déficit public par le précédent gouvernement. Selon les conclusions de cet audit, les données transmises au FMI ne reflétaient pas fidèlement la situation réelle des finances publiques. Résultat : le ratio d’endettement du Sénégal aurait grimpé à près de 100 % du PIB fin 2023, bien au-delà de l’estimation initiale de 74 %. Une distorsion qualifiée de « dette cachée » qui remet en question la crédibilité des rapports budgétaires précédents.
Pour le FMI, la priorité est aujourd’hui d’accompagner Dakar dans un processus de redressement basé sur la transparence et la rigueur budgétaire. « Nous espérons avancer aussi vite que possible. Nous restons engagés », a assuré Abebe Selassie, traduisant la volonté de l’institution de reprendre sa coopération avec le Sénégal, sous réserve d’un échange clair sur les réalités budgétaires du pays.
Cette nouvelle phase de dialogue intervient alors que le gouvernement sénégalais prépare une révision de sa stratégie de gestion de la dette et de mobilisation des ressources. La confiance des bailleurs dépendra désormais de la capacité des nouvelles autorités à assainir les finances publiques et à restaurer la sincérité des indicateurs économiques.