Ils sont de plus en plus nombreux, ces hommes et ces femmes du droit et de la justice —
magistrats, avocats, défenseurs des droits et des libertés — à être ciblés frontalement par
des régimes militaires ou autoritaires en passe de sombrer dans un autoritarisme de plus
en plus débridé, flirtant avec la tentation fasciste.
Partout où le droit est contesté, où les libertés sont réduites à néant, où la voix de la
justice ose encore s’élever, la répression s’abat, brutale et sans limite.
Au Burkina Faso, cela fait désormais plusieurs mois que l’avocat et militant des droits
humains Guy Hervé KAM est arrêté et détenu dans des conditions inacceptables —
procédure illégale, violation des droits fondamentaux, traitement inhumain.
En Guinée, ce 21 juin 2025 à l’aube, c’est Maître Mohamed TRAORÉ, ancien
Bâtonnier de l’Ordre des Avocats, qui a été violemment extrait de son lit par des hommes
armés, encagoulés, sous les yeux de sa famille. Sa fille aînée, qui a tenté de s’interposer,
a été giflée.
Ils sont nombreux aujourd’hui à croupir dans les geôles militaires, dans des maisons
de torture, ou dans des villas transformées en prisons privées : des chambres d’hôtel
à Bamako, des caches à Ouagadougou, où l’on “accueille” celles et ceux qui ont eu le
tort de défendre la loi et de dénoncer le viol des règles fondamentales de l’État de
droit.
Le nouveau clivage : État de droit contre État de force
Le contexte africain n’a jamais été aussi clair : deux camps irréconciliables
s’affrontent.
D’un côté, l’État de non-droit, la brutalité militaire, la violence arbitraire.
De l’autre, la défense du droit, des libertés, de la dignité humaine — incarnée par des
magistrats, avocats, journalistes, militants qui refusent de se taire et de plier.On ne peut plus être soutien actif de ces régimes militaires et s’étonner de subir,
demain, la rigueur de la loi.
Applaudir le crime, se réjouir de l’arrestation arbitraire d’un citoyen, masquer la
vérité derrière de faux récits, c’est commettre soi-même un crime moral — et c’est
se préparer, inévitablement, à un jour de justice.
L’enlèvement de Maître TRAORÉ : un cap franchi en Guinée
Il ne manquait plus que cela. Après avoir attaqué les droits, fragilisé le fonctionnement
même de la justice, ces régimes s’attaquent désormais aux juristes eux-mêmes : à leur
parole, à leur liberté, et désormais à leur existence même.
L’enlèvement d’un avocat — ancien Bâtonnier de surcroît — en Guinée n’est pas un
simple incident : c’est un message glaçant.
Ces pouvoirs illégitimes veulent aller jusqu’au bout : museler, intimider, neutraliser
toute figure libre, jusqu’à faire disparaître les voix du droit.
Face à cette dérive, il ne saurait y avoir de demi-mesure
Ceux qui se taisent sont complices.
Ceux qui détournent le regard, qui répètent sans réfléchir les discours officiels, se
rangent du côté des képis et des baïonnettes.
Ceux qui croient encore en l’État de droit, en la liberté, en la justice doivent agir
sans relâche, faire entendre leur voix, dénoncer l’intolérable — sur tous les fronts,
par tous les moyens légaux.
Le silence, aujourd’hui, est complicité. Seuls les serviteurs du mal peuvent encore se
draper dans ce silence.
Le combat est désormais parfaitement clair :
– Défendre le droit contre ceux qui l’assassinent
– Sauver l’État contre ceux qui le dévorent
– Préserver la liberté contre ceux qui veulent la bâillonner
Et partout où ces régimes accaparent le pouvoir, menacent l’État, le droit, les libertés :
il faudra préparer leur fin. Une fin inéluctable. Une fin nécessaire. Une fin politique
et historique.
Le droit triomphera. Les avocats se lèveront. Et nul ne fera taire la justice.
Mamadou Ismaïla KONATÉ
Avocat à la Cour
Barreaux du Mali et de Paris
Ancien Garde des Sceaux, Ministre de la Justice
Ils sont de plus en plus nombreux, ces hommes et ces femmes du droit et de