Le ton est sec, le verbe tranchant. Dans une publication Facebook aux allures de réquisitoire, le député et président du parti République des Valeurs (RV), Thierno Alassane Sall, a vivement critiqué l’échec du Sénégal à obtenir la présidence tournante de la CEDEAO, finalement confiée au président sierra-léonais Julius Maada Bio.
« Le Sénégal vient de subir le pire camouflet diplomatique de son histoire », écrit-il d’entrée, avant d’égratigner, sans détour, le président Bassirou Diomaye Faye, un temps pressenti pour cette fonction stratégique. Pour Thierno Alassane Sall, il est illusoire pour un président « antisystème » de prétendre diriger une organisation régionale qu’il assimile précisément au système que Diomaye Faye et son entourage dénoncent régulièrement.
Mais au-delà du symbole, le député de la République des Valeurs soulève une interrogation plus grave : celle du manque de cohérence et d’autorité au sommet de l’État sénégalais. Il pointe du doigt un déficit de « charisme et d’autorité » du président, affaibli selon lui par des frictions internes, notamment avec son propre Premier ministre, Ousmane Sonko. Des tensions dont l’écho, selon lui, aurait résonné jusqu’aux couloirs d’Abuja.
Autre cible de sa critique : certains députés sénégalais siégeant au parlement de la CEDEAO, accusés d’avoir tenu des propos jugés hostiles à l’organisation, en parfaite résonance avec les attaques de l’Alliance des États du Sahel (AES), coalition en rupture avec la CEDEAO. Une posture qui, selon Thierno Alassane Sall, aurait contribué à discréditer la candidature sénégalaise.
Avec une ironie mordante, l’ancien ministre du gouvernement Sall évoque les « lots de consolation » que seraient, à ses yeux, les clichés du Premier ministre sénégalais aux côtés d’« officiels de second rang en Chine », pendant que le Sénégal essuyait « la déconvenue du siècle à Abuja ».
Sa conclusion est brutale : « Le populisme se heurte au mur de la réalité du monde », juge-t-il, estimant que les absences simultanées des deux têtes de l’exécutif sur le territoire national sont le signe d’une « offensive désordonnée » qui contribue à « dévaluer » l’image du Sénégal sur la scène internationale.
Cette sortie de Thierno Alassane Sall illustre un malaise plus profond : celui des attentes placées en un pouvoir qui se veut de rupture, mais qui, selon ses détracteurs, peine à s’imposer dans le jeu diplomatique ouest-africain. Un épisode qui pourrait relancer le débat sur la stratégie diplomatique du nouveau régime, à un moment où le Sénégal cherche à redéfinir sa place dans une région en pleine recomposition.